Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Banque des Savoirs, Savoirs faire et savoirs être
3 octobre 2018

" Diplomatie Humanitaire appliquée à la guerre asymétrique contre Boko Haram"

 "La Diplomatie Humanitaire au Cameroun appliquée à la guerre asymétrique contre la secte terroriste Boko Haram"

Travail de fin de formation en Diplomatie Humanitaire organisée par l’ONG DiploFoundation (basée à Malte) et le CICR

par :

NDADJO MBA Hermann

Diplomate et expert des Relations Internationales

(hermamba@yahoo.fr , 237 674 60 35 25)

____________________________________________________________________

SOMMAIRE

Introduction…………………………………………………………………………………….2

Chapitre1 : l'état des lieux de la situation humanitaire sur le Terrain……….…………...4

Section1 : Les indicateurs de la situation humanitaire au Cameroun…………………..4

Section2 : Les catégories d’ONG humanitaires impliquées sur le terrain………………5

Chapitre2 : Les activités menées par les acteurs humanitaires…………………………….7

Section1 : Les Actions Avant-gardistes des acteurs humanitaires ……………………..7

Section2 : les actions réparatrices des acteurs humanitaires au Cameroun…………..…8

Chapitre3 : Les difficultés rencontrées sur le terrain……………………………………...10

Section1 : Les Pesanteurs dans la démarche des Organisations humanitaires………...10

Section2 : Limites inhérentes aux acteurs politiques et institutionnels………….…….11

Chapitre4 : Stratégies de consolidation de la  diplomatie humanitaire ………..……..…12

Section1. Les stratégies nationales ………………………………………..…..………12

Section2. Les stratégies internationales ……………………………………….……....13

Conclusion ……………………………………………………………………………………15

Bibliographie……………………………………………………………………………….…16

 

Résumé

Le monde fait face aujourd’hui à une recrudescence de menaces sécuritaires transfrontalières qui, au même titre que les catastrophes naturelles, nécessitent des réponses humanitaires d’urgence. La réponse humanitaire face a la guerre asymétrique qui oppose le Cameroun à la secte terroriste boko haram dans la région septentrionale du pays participe de ce phénomène.Dans cette étude, il est question de mener une réflexion sur l’état des lieux, les  actions sur le terrain et les propositions pour une action humanitaire plus fluide et efficace.Au terme de cette réflexion, il en ressort d’abord que les ONG présentes sur le terrain (Amnesty International, Human Rigths Watch, Croix Rouge Camerounaise, etc.) mènent des actions salutaires en terme d’encadrement des populations locales dans les localités de Kolofata, Hamchide, Pout et Maga. Ensuite, dans la poursuite de leurs missions humanitaires, ces ONG font face à de nombreuses difficultés dont les plus importantes sont l’insuffisances de moyens financiers, matériels et humains face a l’ampleur des besoins dans les camps des refugiées.

Mots clés : diplomatie humanitaire – guerre asymétrique - secte terroriste - boko haram.

 

INTRODUCTION

Depuis 2012, des pays d'Afrique centrale et occidentales (Cameroun, Tchad, Nigeria, Niger, Benin, etc.) sont engagés dans une guerre asymétrique[1] contre la secte terroriste connue sous le nom de Boko Haram.[2] Cette secte terroriste[3]emploie des moyens de lutte non conventionnels (attaques kamikazes, bombes à la voiture piégée, enlèvements, prises d’otages, etc.) pour faire entendre sa voie et répandre son idéologie. Dans le cas spécifique du Cameroun qui va constituer le cadre spatial de la présente recherche, cette menace est concentrée dans la partie septentrionale du pays en raison de la forte dominance de la culture islamique dans cette région. Plus encore, l'enclavement et la porosité des frontières dans cette partie du territoire qui jouxte la bande sahélo-saharienne constitue un refuge tactique et un terreau favorable pour ce réseau terroriste.

En raison de cette question de sécurité assez préoccupante, une intense diplomatie humanitaire[4] s'est développée dans cette partie septentrionale du Cameroun. Ladite diplomatie est conduite par de nombreuses organisations non gouvernementales à vocation humanitaire[5] en vue d'accompagner l’État camerounais à mieux gérer cet «conflit». La  diplomatie humanitaire telle qu’elle se présente au Cameroun n’est rien d’autre que la réponse activée  pour réduire de manière significative les dégâts  humains et matériels causés par Boko Haram.

 Pour toutes ces raisons, la présente étude se propose d’examiner la “Diplomatie Humanitaire au Cameroun appliquée à la guerre asymétrique contre la secte terroriste Boko Haram".  Comme ce sujet le laisse transparaitre,  il s'agit d'une guerre asymétriquedans laquelle les forces armées camerounaises, soucieuses d'y répondre de façon prompte et efficace, ne sont pas exemptes de toute violation du droit de la guerre.[6]  De  plus,  les  personnes qui sont faits prisonniers de cette guerre du fait de leur arrestation sur le champ des combats ou du fait de leur interpellation par des forces de renseignement, méritent une attention singulière afin que leurs droits ne soient pas bafoués.[7]

Il  n’est donc pas question dans ce travail de présenter la diplomatie humanitaire comme une arme de combat contre le terrorisme, mais il est davantage question de mettre en relief sa valeur-ajoutée dans l’atténuation des effets induits par la guerre que le Cameroun mène contre la menace terroriste. Le  but de cette étude  est donc de montrer comment des actions pacifiques et non militaires peuvent aider les acteurs étatiques à combattre efficacement le terrorisme et atténuer les souffrances de la population dans le strict respect des normes conventionnelles qui encadrent les conflits armés et les principes directeurs qui gouvernent la diplomatie humanitaire.

Pour recueillir les informations, l'enquête documentaire et les entretiens avec des personnes ressources ont été les principales techniques de collecte des données. L'enquête documentaire a consisté à consulter des ouvrages, des thèses et mémoires, des journaux spécialisés  et des rapports d'activités des organisations internationales agissant sur le champ humanitaire camerounais. De même, quelques archives stockées au sein du Ministère des Relations Extérieures ont été dûment explorés.En ce qui est des entretiens, ceux-ci ont consisté en des interviews directes avec des personnalités du secteur public et privé impliquées la diplomatie humanitaire au Cameroun, notamment Jean Marie Ebode, secrétaire générale de la croix  rouge camerounaise ; Essome Ange, chef de la cellule juridique a la croix  rouge camerounaise, Akere Mouna, ancien president resident de transparency international au Cameroun et Bosco Alama, volontaire a Human Rigths Watch.

Les résultats issus de la présente recherche se déclinent en quatre chapitres. Le premier chapitre analyse l'état des lieux sur le terrain (Chapitre1) et le second examine les activités menées par les acteurs humanitaires (Chapitre2). Le troisième chapitre décline les difficultés rencontrées sur le terrain (Chapitre3), et le dernier recense quelques propositions pour une consolidation de la  diplomatie humanitaire au Cameroun (Chapitre4).

 

Chapitre1 : L'état des lieux de la situation humanitaire sur le Terrain

Le Cameroun est considéré dans la sous-région Afrique centrale comme un pays hospitalier.[8] Cette posture ajoutée à sa position géographique centrale fait de lui une terre d’accueil[9] pour les réfugiés venant des pays voisins du fait des crises socio politiques et sécuritaires incessantes. Outre ces déplacés, les prisonniers de guerre issus du conflit avec la secte terroriste boko haram impose une réponse humanitaire d’urgence.  Il sera question dans ce premier chapitre de présenter non seulement les indicateurs de la situation humanitaire au Cameroun (section1), mais aussi la typologie des acteurs humanitaires qui s’investissent sur le terrain (section2).

Section1 : Les indicateurs de la situation humanitaire au Cameroun

Le Cameroun reçoit un nombre élevé de personnes déplacées venant pour la plupart des pays voisins. Les statistiques selon le ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation[10]  apparaissent comme suit:

  • 45% venant du Nigeria à cause des atrocités perpétrées par le groupe terroriste Boko Haram
  • 35% venant de la République centrafricaine en raison de la récente crise politique
  • 15% venant du Tchad à cause de la pauvreté et de la mauvaise gestion.
  • 05% venant du Tchad et du Congo pour d'autres raisons.

               A côté de ces personnes vulnérables qu’il faut nécessairement assister et encadrer dans les camps de réfugiés, il y a aussi les populations riveraines qui sont exposées aux abus et aux dommages causés par la secte terroriste. Ces dernières connaissent une perturbation de leurs activités quotidiennes tout en subissant de façon répétitive des incursions armées de la part des membres de la secte terroristes qui viennent semer des actes de violences, de torture et de pillage de leurs récoltes.

               Cette situation humanitaire décrite plus haut a pour principales conséquences, la fermeture de la frontière terrestre entre le Cameroun  et  le Nigeria. Une chose qui n’est pas sans conséquences sur l’activité économique dans le grand Nord qui, il faut le rappeler, est une zone où l’activité agro-pastorale a permis de fructifier les échanges avec les voisins nigérian, tchadien et centrafricain. Il faut également noter que cette situation engendre un manque à gagner en termes de recettes douanières,  une flambée vertigineuse des prix de certains produits (fabriqués dans les pays limitrophes du Cameroun) sur les marchés locaux, l’arrêt systématique d’importation et d’exportation des produits de première nécessité dans la partie septentrionale  du pays, et le retour au chômage des milliers de jeunes.

De même, l’impact sur l’agriculture et l’élevage n’est pas à minimiser. Les produits agricoles tels les oignons, le mil, les arachides, le maïs et les bovins qui sont constamment exportés vers le Nigéria constituent un costaud manque à gagner[11] pour des nombreux opérateurs économiques camerounais. Pis encore, certaines ONG humanitaires comme la Croix-Rouge, vont même jusqu’à redouter les risques de famine dans le grand Nord.

Section2 : Les catégories d’ONG humanitaires impliquées sur le terrain.

Deux (02) grandes familles d´ONG qui œuvrent au Cameroun peuvent être mentionnées ici. Il s´agit en l´occurrence des ONG dites  caritatives et les ONG dites  de plaidoyer.

-          Les ONG Caritatives.

Ces ONG ont la particularité de s´investir sur le terrain des urgences pour y mener une action opérationnelle. A ce sujet,  trois domaines d´interventions sont très souvent couverts par l´assistance caritative à savoir : les conflits armés, les groupes de populations à risque issus de ces conflits (refugiés, apatrides, femmes, enfants, etc.…) et les catastrophes naturelles,  quel qu´en soit leur origine.  Les ONG caritatives agissent donc dans des secteurs aussi variés que la santé, le développement, la gestion des réfugiés et des déplacés de guerres,  l´aide alimentaire, la lutte contre la pauvreté,  l´approvisionnement en eau, etc. Au Cameroun, c’est le cas de la Croix Rouge Camerounaise.

-          Les ONG de Plaidoyer.

Les défaillances des systèmes interétatiques classiques de protection des populations ont amenés les ONG de plaidoyer à prendre le relai, notamment en amenant les Etats à effectuer des reformes significatives dans les mécanismes de garantie des libertés et droits fondamentaux en vue d´établir une sécurité collective. Ainsi, quatre de leurs activités ont été particulièrement intensifiées au Cameroun, notamment :

-          collecter des informations des victimes auprès des organismes de défense (cas des comités de vigilance et d’auto-défense agissant dans les localités de Pout et de Maga).

-          Mobiliser la communauté internationale à s´impliquer dans la résolution des conflits sur la base des rapports périodiques qui sont dressés sur le Cameroun; c’est le cas rapports annuels de Amnesty International[12] sur la situation humanitaire au Cameroun.

-          Assistance des particuliers pour le dépôt des plaintes et les demandes d´intervention d´urgence dans certains cas de violation de leurs droits. (cette mission est coordonnée par la Commission Nationale des Droits de L´homme et des Libertés – CNDHL)

-          La formation intellectuelle aux activités de contestation ainsi qu´à  l´action directe non violente de désobéissance civile.[13]

               Il existe à ce jour trois sites ou foyers de gestion des affaires humanitaires par une pluralité d’acteurs humanitaires. Cette situation transparait de façon détaillée dans le tableau suivant :

Régions

Extrême Nord

Est

Adamaoua

 

Personnes vulnérables

Populations civiles camerounaises qui ne prennent pas part au conflit

Déplacés centrafricains suite à la crise socio politique dans le pays

Déplacés tchadiens et nigérians

Acteurs humanitaires

-          Fallen Soldiers Patriots

-          CICR/Croix Rouge

-          Comités de vigilance

-       CICR/Croix Rouge

-       Amnesty International

-       HCR

-          -Human Rigths Watch

-          -CICR/Croix Rouge

-          -HCR

 

Chapitre2 : Les activités menées par les acteurs humanitaires

 

Les Actions menées par les ONG sur le terrain humanitaire camerounais sont d’une part avant-gardistes pour assurer un climat de paix et de concorde afin d’éviter toute situation conflictuelle (section1), et d’autre part des actions réparatrices visant la protection des personnes vulnérables dans un contexte de conflit ouvert (section2).

Section1 : Les actions avant-gardistes des acteurs humanitaires

            Résorber un problème c’est bien, mais anticiper sur la survenance d’un problème c’est encore mieux. Conscient de ce paradigme, les acteurs humanitaires  entreprennent des actions auprès des acteurs étatiques dans l’optique de réduire de façon optimale l’avènement d’une situation dommageable. Ces actions avant-gardistes se traduisent notamment par la publication des rapports sur la situation des droits de l’homme ainsi que les actions de plaidoyer auprès des acteurs étatiques

-          La publication des rapports sur la situation des droits de l’Homme.

Elle consiste à interpeller le gouvernement afin que les intérêts des couches défavorables soient pris en compte dans la gestion des affaires publiques. Dans cette rubrique, nous pensons notamment à l´ONG Amnesty International qui publie des rapports annuels sur la situation des droits de l’homme au Cameroun, notamment dans le contexte de la guerre asymétrique avec la secte terroriste boko haram.[14] Ceci  interpelle l’Etat sur les manquements aux droits de l´homme ainsi que les facteurs qui peuvent être à l´origine des conflits. Amnesty International recommande au Cameroun de respecter scrupuleusement les droits des combattants de boko haram qui sont faits prisonniers de guerre et de limiter les traitements cruels dont-ils font l’objet dans les prisons du Nord Cameroun.[15] C’est le cas également de l´organisation des forums et la rédaction des documents et des rapports qui sont mis à la disposition du public par des organisations à l´instar de Human Rights Watch ou de Reporters Sans Frontières (RSF).[16]

-          Le plaidoyer auprès des acteurs étatiques.

Le plaidoyer est un mécanisme par lequel l’on interpelle les pouvoirs publics sur ses devoirs à l’égard de ses populations. Dans cette rubrique, il ya lieu de s’appesantir sur le cas du Comité International pour la Croix Rouge (CICR)  qui, au-delà des actions humanitaires qu´il mène déjà au plan opérationnel sur le terrain,  mène aussi une importante mission de plaidoyer  auprès du gouvernement camerounais, notamment en vue du respect des grands textes juridiques qui consacrent le respect de la dignité humaine en période de conflits.[17] A ce titre, dans le conflit armé qui oppose le Cameroun à Boko Haram dans les localités du Nord (Kolofata, Maga, Hamchidé, etc), la Croix Rouge Camerounaise s’est assignée pour missions de :

  • Protéger les populations civiles qui ne sont pas directement impliquées dans les combats ;
  • Etablir une claire différence ou ligne de démarcation entre les civils et combattants ;
  • S´assurer que la sécurité humaine soit véritablement sauvegardée ;
  • Veiller sur la typologie des armes qui sont utilisées lors des combats afin d´éviter des conflits asymétriques.

Section2 : Les actions réparatrices des acteurs humanitaires

S’il est une chose délicate dans l’assistance humanitaire apportée aux personnes par les ONG, c’est bel et bien celle de la réinsertion socioprofessionnelle de ces dernières une fois que la catastrophe ou le conflit est achevé. C’est ici que se décline la mission réparatrice de la croix rouge camerounaise qui, outre le management des hostilités sur le terrain, intègre aussi la reconstruction des édifices détruits.

-           L’encadrement des personnes vulnerables sur le champ humanitaire

Il  est question dans le cas d’espèce d’exécuter des différentes tâches visant à minimiser  l’impact  du conflit sur le terrain et  sécuriser  les  personnes  ainsi que leurs biens.  Ceci passe par l’administration des premiers soins et premiers secours.  Dans le cas spécifique de la guerre asymétrique en cours dans  le  Nord  Cameroun,  nous  noterons  que  le rôle de la Croix-Rouge Camerounaise  consiste notamment à :

  • Recenser les populations sinistrées et leur apporter les premiers secours;
  • Procéder à la construction des abris de recasement ; notamment à Wadai, Maga et Pout, pour abriter les refugiés qui arrivent par milliers des pays voisins.
  • Assurer un soutien psycho-social et même émotionnelle aux personnes traumatisées par des actes terroristes de hautes violences (attaques kamikazes, bombes à la voiture piégée, enlèvements, prises d’otages, etc.)
  • Collaborer avec les populations afin d’avoir des informations sur l’ampleur des dégâts sur le terrain;[18]

A ce jour, près de quarante-six milles (4­­6.000)[19] volontaires de la Croix Rouge camerounaise sont déployés  dans  les 58  départements que compte le Cameroun selon les statistiques du ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation.

-          Reconstruction et insertion socioprofessionnelle des personnes sinistrées.

Il  s’agit  de  procéder  à  une  reconstruction  systématique  des maisons, églises, écoles et mosquées  endommagées  par  le  conflit, afin de permettre aux populations de mener une vie normale. Plus encore,  la  Réhabilitation  se traduit par  la  promotion  de  l’insertion  socioprofessionnelle des  personnes  éprouvées ;  en orientant  ces dernières  notamment  dans les activités agropastorales,  le petit commerce  et  autres  activités  génératrices  de revenus. Il va de soi que le manque de moyens financiers ne permet pas toujours à la  Croix-Rouge  de  réhabiliter  toutes  les  personnes  vulnérables.  Du coup, elle est obligée  de  se  limiter  à  des  personnes  jugées  les plus vulnérables de la société, notamment les femmes, les handicapés, et les orphelins.

Hormis cette reconstruction des dégâts causés, la Croix rouge camerounaise ainsi que le HCR encouragent des activités génératrices de revenus pour des refugiés qui ont décidés de s’établir durablement sur le sol camerounais. Il s’agit des activités a but lucratives telles que : agriculture, couture, petit commerce, artisanat, etc.

Il faut relever pour le saluer,  que  la  Croix-Rouge  travaille  toujours de concert avec la Direction de la Protection Civile qui,  placé sous l’autorité du ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation,  est l’organe public de gestion  des  catastrophes  au  Cameroun.  Ce qui provient de la Croix Rouge Camerounaise est indispensable pour les institutions étatiques camerounaises ayant pour missions d’encadrer les refugiés établis dans son territoire.

 

Chapitre3 : Les difficultés rencontrées sur le terrain

Les pesanteurs auxquelles les organisations humanitaireries font face au Cameroun sont inhérentes d’une part à  leur propre fonctionnement et, d’autre part, à  l’environnement polico-institutionnel dans lequel ces dernières évoluent.

Section1 : Les Pesanteurs dans la démarche des Organisations humanitaires.

-          L´épineuse question du financement des ONG.

Les ONG sont par essence des associations internationales créées à travers des initiatives privées et, à ce titre, elles ont  besoin  des  financements  importants  non  seulement pour la conduite efficiente des opérations sur le terrain, mais aussi  et surtout pour permettre la pérennité de l'organisation.  Il se pose donc à n´en  point  douter, la problématique de l'indépendance et de l´autonomie des ONG vis-à-vis des  institutions publiques et privées qui les financent dans la mesure où les donateurs ont généralement la tendance d´influencer la feuille de route des associations bénéficiaires. Par conséquent,  ces dernières sont parfois réticentes à adopter publiquement des positions qui sont de nature à incriminer celles du gouvernement camerounais, ou encore d´adopter une démarche qui irait à l´encontre de l´Etat ou de l´institution qui contribue à leurs budgets de fonctionnement ou ayant mis à leur disposition des ressources matérielles ou humaines. Il est en effet difficile dans ces conditions de séparer les mobiles humanitaires, des mobiles politiques et de s'assurer du total désintéressement des puissances qui financent les ONG.

-          Problème lié aux conflits des compétences sur le terrain.

D’autres critiques, et non des moindres,  formulées à l´endroit des ONG concernent le nombre impressionnant  de leur nombre et de leurs  champs  d´interventions qui  contribue à disséminer les forces actives,  voire à créer une concurrence entre eux quant-à ce qui concerne les modalités et les secteurs d´interventions dans la gestion des conflits en Afrique Centrale. D’autant plus que parmi la multitude d’ONG, qu’elles soient humanitaires ou de développement, qu´elles relèvent de l´hémisphère Nord ou de l´hémisphère Sud, qu´elles soient  laïques ou religieuses,  des divergences d’intérêts ou d’idéaux peuvent se présenter.


 

Section2 : Limites inhérentes aux acteurs politiques et non-institutionnels.

-          La controverse sur la neutralité des ONG ou le dilemme de la contestation

Les ONG sont par essence des acteurs non-étatiques. En vertu de cette posture, elles semblent partagées entre le souci d´être reconnu par l´Etat d´accueil et l´impératif de mener une activité digne de foi et crédible, qui puisse leur permettre de justifier les financements qu´ils bénéficient auprès des bailleurs de fonds et des Etats.  Face à cette situation, le problème fondamental réside dans le fait que  les ONG  humanitaires,  par leurs actions sur les terrains de crise, sont très souvent confrontées  à ce qu´il convient d´appeler  le  « dilemme de la dénonciation » : se taire pour rester ou parler et risquer d’être expulsé.  Plus encore, ce dilemme pousse un certain nombre d’acteurs  non-étatiques à choisir la confidentialité dans leur stratégie d’influence comme  c´est  généralement le cas avec le  Comité International pour la Croix  Rouge (CICR) qui a développé une approche basée sur la confidentialité et où le choix de la dénonciation publique est exceptionnel[20].   En outre,  l´ONG ne dispose pas d´un pouvoir contraignant dans la protection et la promotion des droits de l´Homme. Elle se charge seulement de recueillir les plaintes des populations abusées par les conflits armés et de les transmettre auprès des instances  juridiques internationales.  Les différentes commissions internationales des droits de l´Homme conduites par Amnesty International ont uniquement une fonction consultative qui se limite à la promotion,  l´information et la sensibilisation pour le respect de la dignité humaine[21].

-          La question de la  légitimité  et de la reconnaissance des ONG.

La montée en puissance des ONG sur la scène internationale a engendré un certain nombre de critiques de la part de l’Etat, du secteur privé mais aussi et surtout des critiques émanant de la société civile.  Par ailleurs, les actions des ONG sont parfois jugées illégales voire illégitimes  par  ces derniers. Les ONG sont qualifiées d´acteurs sans souveraineté et leur reconnaissance a souvent été remise en cause par l´Etat. Dans les Pays en Voie  de Développement (PVD) et singulièrement en Afrique Centrale, les ONG et notamment celles qui œuvrent dans le domaine de la défense des Droits de l´Homme ont  pendant  beaucoup trop longtemps été perçues comme des appendices, voire des ramifications des partis politiques de l´opposition[22]

Chapitre 4 : Stratégies de consolidation de la  diplomatie humanitaire

 

La secte terroriste Boko Haram est une menace transnationale et asymétrique à mettre dans la catégorie des problématiques globales nées à la faveur de la mondialisation et donc l’éradication appelle à la synergie d’action. C’est dans cette logique que le président de la République du Cameroun affirme que « A menace globale, riposte globale ».[23] Ainsi, pour une gestion efficiente de la guerre asymétrique au Cameroun dans le respect du corpus juridique et des principes directeurs qui encadrent la diplomatie humanitaire, il faut distinguer les stratégies nationales (section1) de celles qui sont d’ordre internationales (section2).

Section1. Les stratégies nationales

Il faut tout d’abord améliorer considérablement les conditions de vies des populations et surtout promouvoir l’emploi des jeunes qui, faute de perspectives d’avenir claires, se laissent entrainer dans ces groupes et réseaux terroristes en vue de gagner leur pain quotidien. Conscient de cette situation, les autorités du ministère camerounais de la jeunesse ainsi que celui de l’emploi et la formation professionnelle ont mis sur pied deux programmes[24] : le plan triennal spécial jeune d’une part et le plan d’urgence pour le développement de l’extrême Nord, le tout pour une enveloppe budgétaire de 101 milliards de FCFA.

La deuxième solution passe nécessairement par l’activation  du dialogue interconfessionnel. C’est de manière anticipatrice que les autorités doivent engager le dialogue interconfessionnel. Si la menace s’inscrit de manière durable, elle peut menacer une des choses les plus précieuses que la République du Cameroun a : La coexistence pacifique des confessions religieuses différentes. Autre chose, il convient de surveiller et structurer le mouvement islamique national. Les autorités  doivent  veiller au contrôle de ce qui se passe dans les lieux de formation, dans les écoles coraniques. Il faut mieux suivre les itinéraires de formation des arabizans. Elles doivent bien suivre les affiliations doctrinales.

Ceci passe par des actions visant à empêcher voire à atténuer les dégâts. A titre illustratif,  il s’agit de sensibiliser;  éduquer  les  masses. De même, une autre attitude consiste en une formation des volontaires de la croix rouge camerounaise;  un recrutement et un recyclage des volontaires le  déploiement  des  volontaires sur le terrain suivant une logique  de segmentation territoriale c’est à dire dans les différents départements que compte le pays.

-          Activer le partenariat public-privé (ou Etats-ONG).

Porte-paroles de la contestation, soucieuses d’améliorer le bien-être des populations, les ONG ont généralement une bonne image auprès des opinions publiques nationales et internationales, ce qu’elles ne manquent d’ailleurs pas d’entretenir. Elles interviennent lors des conflits pour offrir un soutien de qualité  aux individus en détresse,  à l´écart des parties au  conflit ; et, leurs interventions sont beaucoup plus promptes,  pratiques  et  opérationnelles que celles des pouvoirs institutionnels ou des organisations intergouvernementales qui prennent généralement  beaucoup  de  recul et de temps  avant de mobiliser des moyens financiers, matériels et humain dans la gestion des conflits.  En effet, les acteurs institutionnels sont conscients de la contribution des actions humanitaires comme le CRC, HRW, AI et le CICR dans la conduite de ses missions régaliennes. Ces dernières utilisent des moyens pacifiques pour alléger les souffrances des personnes vulnerables et des civiles qui ne prennent pas part au combat. Il ya donc une complémentarité directe entre les actions militaires conduites par le Cameroun d’une part, et les actions diplomatiques conduites par les acteurs humanitaires d’autre part.

Section2. Les stratégies internationales

En guise de solutions au niveau international, il y a lieu d’améliorer la coordination en matière de renseignements non seulement entre la désormais première puissance économique du continent et ses quatre pays frontaliers que sont le Cameroun, le Tchad, le Niger et le Bénin, mais aussi avec les alliés occidentaux dont la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis.  Car, il est évident qu’un seul pays ne peut efficacement lutter contre ce mouvement terroriste qui étale ses tentacules là où ça lui chante et qui dispose de base arrière dans beaucoup de pays, avec pour terrain de prédilection le territoire camerounais.

Dans le même ordre d’idées, l’Union Africaine (UA), d’un point de vue politico-diplomatique doit manifester une véritable volonté politique de la part des dirigeants africains ; ce qui pourrait se traduire par une mutualisation des ressources (financières, humaines et opérationnelles) autour d’une probable politique africaine de sécurité commune. En d’autres termes, il faut répondre à la menace dans une logique de solidarité africaine et panafricaine. Cela veut dire que les dirigeants de tous les Etats concernés  doivent, et  c’est un impératif concevoir  une vision pour faire face au problème d’abord en Afrique.

Les Etats de l’Afrique Centrale agissent soit de façon individuelle, soit de façon groupée au sein des entités intergouvernementales que sont la CEEAC et la CEMAC. Dans le premier cas de figure, la gestion des catastrophes relèvent des missions régaliennes de l’Etat et ceci lui impose de mobiliser la coopération classique ou de s’adresser aux organismes nationaux dédiés à la gestion des catastrophes ; comme l’Agence Nationale de la Protection Civile au Cameroun.

Dans le second cas, les organisations sous régionales concernées mutualisent leurs ressources matérielles, financières et humaines pour aller à la rescousse d’un Etat membre frappé par une catastrophe. Cette aide s’inscrit par conséquent dans le cadre de la solidarité sous régionale.

 

CONCLUSION

 

Le Cameroun est véritablement engagé dans une crise humanitaire. Il doit gérer à la fois les refugiés en provenance des pays frontaliers et les dégâts matériels et humains causés par la guerre asymétrique contre la secte terroriste boko haram. Les actions humanitaires des diplomates sont visibles dans les localités de Maga, Pout, Wadai, Kolofata, etc. le flux des personnes déplacés à encadrer sont d’autant plus considérables au point que les autorités préfectorales camerounaises envisagent un rapatriement des réfugiés nigérians dans leurs pays de provenance. Toutefois, l’action humanitaire qui se déroule sur le terrain n’est pas sans obstacles.   La communauté internationale, les organisations régionales et sous-régionales ainsi que des volontaires devraient se mobiliser davantage pour capaciter les acteurs humanitaires en moyens financiers, matériels et humains.

BIBLIOGRAPHIE

ABWA Daniel, « Le Cameroun : pole intégrateur en Afrique Centrale ? » in Dynamiques d’intégration en Afrique Centrale ?, PUY, 2002.

Accord de siège entre  l´ONG  CARE  International  et  le Cameroun, 2009

BANAKEN Elel Nelly,  Les Droits de  l´Homme en Afrique Centrale : Impact des nouveaux  mécanismes internationaux  de protection, Mémoire de  Master,  IRIC, 2006.  

GOLAY Christophe,   Géopolitique  de  la  faim, collectif des membres d'ACF, éd.   La  Découverte, PUF,  2004.

Dauvin   et   als.   Le travail humanitaire : les  acteurs des  ONG,  du  siège  au terrain,  Presses de  Sciences Po, Paris, 2008.

Jost et  Perriot, Le Guide  des Actions Humanitaires, Paris, éd. Hors Collection, 2006.

Jeune Afrique,  no  2771 du  16  au  22  février 2014.  

MINREX, « Cameroun : terre d’accueil et d’opportunités », document publié lors de la 10e édition des journées d’amitié Cameroun-Europe, juillet 2013, p.3.

PERROULAZ Gérard,  « rôle  des ONG  dans  la  politique  de développement: forces  et limites, légitimité  et  contrôle  », Annuaire suisse  de politique  de  développement,  2004.

Pourtier, l'Afrique centrale dans la  tourmente. Les enjeux de  la  guerre  et de la  paix au  Congo et alentour  », Hérodote  n°111, 2003.

Raulin,  Les ONG  dans la  Société Internationale, Paris,  ESTER éditions, 2007.

Rapport d’Amnesty International sur le Cameroun, 2017.



[1] Une guerre asymétrique est une guerre qui oppose la force armée d'un État à des combattants matériellement insignifiants, qui se servent des points faibles de l'adversaire pour parvenir à leur but souvent politique ou religieux. Les guerres asymétriques englobent notamment le terrorisme ou la guérilla et se distinguent des guerres entre États.

[2] Boko Haram, dont la signification étymologique est “l’éducation occidentale est un péché", est une secte terroriste islamiste fondée en 2002 par YUSUF  Ahmed,  ancien sympathisant d’Al-Qaïda. Basée au départ au Nigeria, elle va se répandre progressivement dans les pays voisins. L'objectif de cette organisation armée consiste à propager la culture islamique par la force, avec pour finalité l'établissement d'un Khalifa.

[3] Selon le Professeur Joseph Vincent NTUDA EBODE, Géostratège, une secte terroriste désigne toute forme de menace réelle ou symbolique, menée par un groupe de personnes armées ou non, qui emploie des moyens de lutte non-conventionnels pour imposer leur idéologie au sein d’un ordre politique établi.

[4] La diplomatie humanitaire est l’ensemble des contacts discrets ou publics de Gouvernements et d’organisations humanitaires avec d’autres Gouvernements et avec des entités de la société civile pour : avoir accès aux victimes afin d’évaluer leur situation et l’ampleur et la nature des besoins ; faire accepter aux différents acteurs l’assistance et la protection qui seraient nécessaires ; négocier des facilités d’accèsaux populations sinistrées pour le personnel humanitaire ; assurer la sécurité et le statut du personnel expatrié et local ; négocier des garanties de sécurité pour la population civile et pour les autres bénéficiaires de l’action humanitaire ; coordonner l’action humanitaire ou assurer une concertation entre organisations humanitaires; promouvoir la codification, la ratification, l’application et la mise en œuvre du droit humanitaire au sens large.

[5] Les ONG  telles que Human Rigths Watch, Amnesty International, la Croix Rouge Camerounaise, etc.

[6] Il s’agit pour l’essentiel des quatre conventions internationales de Genève de 1949 ainsi que leurs protocoles additifs.

[7] Rapport annuel d’Amnesty International, juin 2017,  sur l'état des droits de l'Homme au Cameroun.

[8] Daniel ABWA, « Le Cameroun : pole intégrateur en Afrique Centrale ? » in Dynamiques d’intégration en Afrique Centrale ?, PUY, 2002, p.57

[9] MINREX, « Cameroun : terre d’accueil et d’opportunités », document publié lors de la 10e édition des journées d’amitié Cameroun-Europe, juillet 2013, p.3.

[10] MINATD, Bulletin trimestriel No 124 du 14 novembre 2016, p.12

[11] Soit 5 milliards de FCFA chaque année, selon les estimations de la direction générale des douanes.

[12]  Rapport Annuel Amnesty International, 2017.

[13] Rapport Annuel Amnesty International, 2002, p.5.

[14] Paul Elvic Batchom, Boko haram, l´affront d’un peuple contre un ennemi commun. Les logiques d’un conflit de type nouveau, Afredit, 2013, p.28

[15] Rapport Annuel Amnesty International, 2002, p.5.

[16] Lire le REDHAC, Annuaire des droits de l’homme au Cameroun, 2015, pp.15-56

[17] Il s´agit des 04 conventions de Genève qui encadrent les conflits armés.

[18] Cette démarche s’inscrit dans le souci de mettre sur pied une plate forme de concertation armée-populations locales-sociétés civiles.

[19] Chiffres du MINATD

[20] A. Robyns et V. Geoffroy,  Influence des ONG internationales sur les politiques publiques, Groupe U.r.d., Septembre 2009, p. 12.

[21]Voir le pacte international relatif aux droits civils et politiques ; et celui relatif aux droits sociaux, économiques et culturels.

[22]Fontanel et als. , Les organisations non gouvernementales ou l’homme au cœur d’une mondialisation solidaire, Paris, L’Harmattan, 2009, p.428.

[23] Extrait de son discours inaugural à l’occasion de la conférence des Chefs d’Etats de la CEMAC, de la CEEAC et de la CGG, tenue à Yaoundé en juillet 2015 sur le thème « cohérence et synergie d’actions pour une lutte efficace contre la secte Boko Haram ».

[24] La finalité de ces deux programmes est de limiter les relations de complicité et de connivence entre les populations et les  membres de la secte terroriste Boko Haram, notamment par une amélioration substantielle des conditions de vie des populations.

Publicité
Publicité
Commentaires
Banque des Savoirs, Savoirs faire et savoirs être
  • Vous êtes élève, étudiant, chercheur ou professionnel dans quel que domaine que ce soit, trouvez sur cette plate forme l'essentiel des ressources et informations nécessaires à votre rendement optimal dans ce que vous faites. Bonne Dégustation
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité